mars 2024

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La profession du chiffre est en effervescence depuis quelques jours. Les seuils de désignation obligatoire des commissaires aux comptes (Cac) dans les sociétés commerciales seraient de nouveau sur la sellette. Dans un courrier à la profession daté de vendredi dernier, la Compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC) affirme que le ministère de l’économie et des finances « examine la possibilité » d’un relèvement des seuils dans le cadre du projet de loi de simplification qui sera présenté cet été.

Cette nouvelle intervient quelques semaines seulement après la publication du décret du 28 février 2024 qui a fait passer le seuil de total de bilan de 4 à 5 millions d’euros, et le seuil de chiffre d’affaires de 8 à 10 millions d’euros (le seuil de 50 salariés est inchangé).

7,5M d’euros de total de bilan et 15M d’euros de chiffre d’affaires ?

Selon la CNCC, Bercy « souhaiterait opter » pour un nouveau relèvement à 7,5 millions d’euros de total de bilan et 15 millions d’euros de chiffre d’affaires. Soit les limites maximales autorisées par les textes européens. Ces seuils s’aligneraient ainsi sur les seuils des petites entreprises en matière comptable (présentation, publication) ainsi que sur les seuils de l’obligation de reporting de durabilité (voir notre article).

« Nous avions obtenu que cette option soit écartée dans le cadre de la transposition de l’acte délégué sur les effets de l’inflation en Europe », déplore Yannick Ollivier, président de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes. « Le simple fait de remettre ce sujet à l’ordre du jour, quelques semaines seulement après le décret du 28 février, est incompréhensible ». 

Selon l’élu, « le relèvement envisagé ne constitue ni une mesure de simplification, ni une mesure d’économie pour les entreprises. Une fausse mesure de simplification, parce que la présence d’un commissaire aux comptes auprès des petites entreprises ne représente, en aucun cas, un élément de complexité, bien au contraire. (…) Une fausse mesure d’économie, puisque qu’elle ne permettrait pas d’alléger les dépenses de l’Etat, et parce que cela reviendrait à affaiblir la crédibilité financière des entreprises vis-à-vis des financeurs, privés ou publics (…) ».

Remise en cause de l’exercice libéral

Cette restriction du périmètre de l’audit légal aurait des conséquences « désastreuses » pour la profession, estime Yannick Ollivier. Ce possible relèvement des seuils d’audit légal « impliquerait une remise en cause profonde de l’exercice libéral et une dynamique de concentration dangereuse, alors même que la diversité d’exercice qui caractérise le secteur de l’audit en France constitue une de ses grandes forces et un pilier de sa qualité ».  

D’autres voix se sont élevées contre ce potentiel projet gouvernemental. Cécile de Saint Michel, présidente du Conseil national de l’ordre des experts-comptables, estime qu’un tel relèvement des seuils « serait fatal pour l’exercice libéral ». « C’est inacceptable ! », déclare-t-elle dans un communiqué du 22 mars. « Ce rehaussement des seuils menace non seulement l’existence même des libéraux et de leurs cabinets mais risque aussi d’entraîner une concentration du marché audit au sein des superstructures. C’est cette diversité qui fait pourtant notre force, nous devons la préserver à tout prix ».

Du côté des syndicats patronaux, ECF dénonce un « acharnement politique totalement injuste » et craint un accès des futurs et jeunes diplômés au métier de Cac uniquement par les gros cabinets et « grands réseaux anglo-saxons ». L’Ifec indique que « la mesure ne servirait à rien en termes de simplification et de coût pour les entreprises (moins de 7 200 € en moyenne par entreprise concernée) ». Le mouvement Ensemble pour agir a également réagi. Et certains cabinets ont fait entendre leur voix, comme le président du groupement Audecia qui décrit une « initiative incohérente ».

Question à l’étude

A Bercy, on temporise. « Tout est à l’étude, dont la question des seuils de désignation des CAC. A ce stade, rien n’est acté », nous répond le cabinet de Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Contacté, le ministère de la justice n’a pas encore répondu.

Le président de la CNCC indique qu’il va rencontrer les cabinets du Premier ministre, du ministre de la justice et du ministre de l’économie et des finances « pour porter [son] message » et ne pas subir un second relèvement de seuils d’audit légal en un an. 

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Le ministère de l’économie et des finances, que nous avons contacté, indique que les seuils de désignation des commissaires aux comptes font partie des sujets à l’étude dans le cadre de la prochaine loi de simplification mais rien n’est décidé à ce stade.
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Le Bofip publie le nouveau montant de la franchise d’impôts commerciaux dont bénéficient les organismes sans but lucratif au titre de leurs recettes d’exploitation provenant de leurs activités lucratives accessoires. Ce seuil est porté à 78 596 euros (contre 76 679 euros précédemment) :

► pour les exercices clos à compter du 31 décembre 2023 en matière d’impôt sur les sociétés ;
► pour l’année 2024 en matière de contribution économique territoriale (CET) ;
► pour les recettes encaissées à compter du 1er janvier 2024 en matière de TVA. Cependant, le seuil de 78 596 euros sera également retenu « comme seuil de référence pour apprécier l’éligibilité à l’exonération dépendant du niveau de chiffre d’affaires de l’année civile précédente (l’année 2023) ».

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L’augmention (d’environ 4 %) des montants mis en recouvrement en 2023 en lien avec la fraude fiscale détectée (lire notre article dans cette édition) pose une question qui n’est pas nouvelle : est-ce dû à une meilleure efficacité des services chargés de lutter contre cette fraude ou à une progression de la fraude ? A défaut d’estimation officielle publique de la fraude fiscale, il est impossible de répondre. Rappelons qu’en octobre dernier, le gouvernement a lancé le conseil d’évaluation des fraudes fiscales, sociales, douanières et aux aides publiques. Une première restitution des travaux sous la forme d’un bilan d’étape doit intervenir d’ici le mois de juin 2024.

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Hier, le gouvernement s’est félicité « d’un record historique », celui d’avoir mis en recouvrement l’année dernière 15,2 milliards d’euros issus de la lutte contre la fraude fiscale, « soit plus 600 millions par rapport à 2022 et 3,5 milliards de plus qu’en 2019 ». Et d’ajouter que « les redressements Urssaf ont augmenté de 50 % sur la fraude sociale des entreprises avec 1,2 milliard d’euros redressés en 2023 contre 800 millions en 2022 et 500 millions en 2017 ».

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Les commissaires aux comptes ont jusqu’au 31 mars 2024 au soir pour déclarer les honoraires facturés en 2023. Comme les années passées, il s’agit des montants facturés aux entités dont le Cac assure la mission de certification des comptes (y compris les services autres que la certification des comptes – SACC). « L’entrée en vigueur des modifications du code de commerce au 1er janvier 2024 n’a aucune conséquence sur les déclarations à effectuer en 2024, la mission durabilité n’étant pas encore effective », rappelle la Haute autorité de l’audit (H2A). 

Par ailleurs, les professionnels ont jusqu’au 30 avril 2024 au soir pour payer leurs cotisations 2024 dues à la nouvelle H2A.

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L’examen de conformité fiscale attire peu par rapport à sa cible potentielle. « Au 15 juillet dernier [2023], 248230 ECF avaient été signalés dans les déclarations de résultats depuis l’instauration de ce dispositif en 2020, avec une tendance croissante au recours à cette prestation contractuelle. On recense 24701 ECF pour les exercices clos au 31 décembre 2020, 101549 ECF pour les exercices clos au 31 décembre 2021 et 121980 ECF pour les exercices clos au 31 décembre 2022 », vient de communiquer le ministère chargé de l’industrie et de l’énergie qui estime que le dispositif n’est pas assez connu.

Amendements retirés lors du projet de loi de finances pour 2024

Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2024, des amendements de sénateurs ont proposé de nouvelles mesures pour rendre le dispositif davantage séduisant. Parmi elles, celle de sécuriser (sous conditions) les charges des entreprises dont la conformité fiscale est attestée par un ECF. Mais toutes ces propositions ont disparu, soit parce qu’elles ont été retirées par leurs auteurs soit parce que ces derniers ne les ont pas soutenues. Conséquence : la position des pouvoirs publics n’a pas été connue publiquement à cette occasion.

Interrogation d’une sénatrice

Mais à présent, on sait que Bercy s’oppose à ce type de mesure. Il vient de le faire savoir en réponse à une question parlementaire. La sénatrice Annick Jacquemet (Union centriste) l’a interrogé sur « l’opportunité d’accorder la prescription fiscale sur les dépenses et charges de l’entreprise dès lors que celle-ci se soumet à un ECF, réalisé par un tiers de confiance (organismes de gestion agréés, experts-comptables, commissaires aux comptes), et fait l’objet d’un compte rendu de mission positif adressé à l’administration fiscale ». Tout en prévoyant une limite : « si l’administration, dans le cadre de son contrôle selon les règles actuelles du droit commun, sur les produits de l’entreprise, et notamment en matière de taxe à la valeur ajoutée (TVA), met au jour des anomalies traduisant des manoeuvres délibérées ou des activités dissimulées, elle retrouverait alors toutes ses prérogatives de contrôle en matière de dépenses. La prescription deviendrait dès lors immédiatement caduque », précise la sénatrice.

Inégalités des contribuables devant le contrôle

Pour Bercy, c’est non. « il n’est envisageable, ni d’accorder la prescription fiscale sur les dépenses et charges de l’entreprise dès lors que celle-ci se soumettrait à l’ECF réalisé par des tiers de confiance, ni d’instaurer une «sanctuarisation» des charges et dépenses », résume le ministère chargé de l’industrie et de l’énergie.

Plusieurs raisons sont avancées. « Sur le plan juridique, cette proposition est porteuse d’inégalités des contribuables devant le contrôle », justifie le ministère. Autre raison invoquée, celle de la création d’un monopole au profit de certaines professions. « [Cela] reviendrait à assimiler de facto l’ECF à un contrôle fiscal, en créant un monopole au profit de certaines professions qui se verraient reconnaître un statut «d’auxiliaires des administrations » fiscales en étant investis d’un pouvoir de contrôle délégué. Or, un tel monopole reviendrait à déléguer à ces tiers de statut privé un service public dont l’exigence découle d’exigences constitutionnelles », est-il avancé.

Enfin, Bercy considère cette proposition non opportune. Pour lui, « prévoir que les dérogations précitées ne s’appliqueraient pas en cas de découvertes de manoeuvres délibérées ne peut pas prospérer puisque c’est précisément lors des contrôles fiscaux que les manoeuvres délibérées sont mises à jour et caractérisées en droit ». Bref, les pouvoirs publics estiment qu’il faut mieux faire connaître l’ECF et ne proposent pas de modifier le dispositif sur le fond.

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Une sénatrice a interrogé les pouvoirs publics sur l’opportunité de sécuriser fiscalement (sauf exceptions) les charges et dépenses validées par un examen de conformité fiscale (ECF). Bercy y est opposé pour plusieurs raisons.
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Le marché européen de l’audit est-il en train de changer de visage ? Selon un rapport de la Commission européenne du 5 mars 2024 sur le contrôle légal des comptes des entités d’intérêt public (EIP) dans l’Union européenne (*), la répartition de l’audit des EIP entre les acteurs évolue. Les Big Four ont abandonné une partie de leur part de marché au profit d’autres cabinets. Même si le degré de concentration du marché reste élevé. 

Une plus grande proportion du travail effectuée par d’autres acteurs de marché que les Big Four

Ainsi, Deloitte, EY, KPMG et PwC représentent en 2021, 59 % du marché des contrôles légaux des comptes d’EIP. Par comparaison, leur part de marché moyenne s’élevait, en 2018, à près de 70 % en termes de nombre de mandats détenus auprès des EIP. « Une plus grande proportion du travail est effectuée par d’autres acteurs de marché que les Big Four » tels que Mazars et BDO, relève la Commission européenne.

 

Par ailleurs les Big Four ont réalisé 86 % du chiffre d’affaires tiré de l’audit légal des comptes d’EIP. Un pourcentage légèrement inférieur aux 92 % de 2018, « ce qui s’explique en partie par le fait que les cabinets d’audit britanniques ne sont plus inclus dans le total de l’UE, à la suite du retrait du Royaume-Uni de l’UE ». Les modifications de la structure du marché en termes de chiffre d’affaires sont donc moins importantes qu’en termes de nombre de missions.

 

Même si le rapport note un « léger glissement », le marché européen de l’audit reste globalement entre les mains des quatre poids lourds de la profession.

Lacunes dans les procédures d’audit et dans l’évaluation des risques

Cette concentration du marché a-t-elle un impact sur la qualité de l’audit ? Aucun risque systémique n’est identifié mais la Commission européenne relève « une fréquence élevée de lacunes » qualitatives du contrôle légal des comptes d’EIP dans le cadre des inspections menées par les autorités nationales chargées de la supervision de l’audit.

Les examens de 737 dossiers de contrôle légal des comptes d’EIP réalisés en 2021 ont donné lieu, en moyenne, à « 2,6 constatations (…) par dossier ». « Les constatations faites lors d’inspections concernent des lacunes dans les procédures d’audit qui montrent que le cabinet d’audit ne disposait pas de suffisamment d’éléments appropriés pour étayer son opinion, mais qui n’impliquent pas nécessairement que les états financiers concernés comportent des anomalies significatives », souligne le rapport. 

Les principales lacunes constatées sont des « procédures d’audit insuffisantes et/ou manque d’éléments probants », le non-respect de normes, une « évaluation insuffisante des risques par l’auditeur », une « absence de vérification des contrôles internes », « l’absence d’exécution en temps utile de l’examen de contrôle qualité de la mission et/ou documentation inadéquate », ou encore une « évaluation insuffisante des services autres que d’audit fournis aux clients dont ils contrôlent les comptes ». L’archivage des dossiers d’audit et la documentation d’audit sont également pointés du doigt. 

Le projet de réforme européenne de l’audit au point mort ?

« Cela fait écho à la demande d’une plus grande transparence sur les résultats des inspections émise par le public, ou du moins par des comités d’audit, afin de renforcer la responsabilisation et d’assurer une meilleure compréhension du niveau de qualité de l’audit au niveau des entreprises », souligne le rapport. Ces constatations relancent donc la question d’une prochaine réforme européenne de l’audit des EIP. Le sujet est toujours d’actualité, indique la Commission européenne que nous avons contactée. Pourtant, rien n’a avancé depuis le lancement de ce dossier il y a presque trois ans

 

Hausse des auditeurs d’EIP

Entre 2018 et 2021, le nombre de contrôleurs légaux des comptes d’EIP a augmenté de 11 % dans l’UE et que le nombre d’EIP a légèrement progressé de 3 %.

Par ailleurs, l’Allemagne et la France représentent 47 % du chiffre d’affaires réalisé par les cabinets d’audit dans l’UE (**).

 

 

(*) Le rapport inclut les données des 27 Etats membres de l’Union européenne ainsi que de la Norvège (les données de celle-ci ne figuraient pas dans la précédente édition de 2018 et ne sont donc pas incluses dans les chiffres de 2018).

(**) Pas de données sur ce point pour la Belgique et la Suède.

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La part de marché des Big Four dans l’UE en terme de mandats EIP et de chiffre d’affaires tiré du contrôle légal des comptes de ces entités diminue, selon un rapport de la Commission européenne. Une fréquence élevée de lacunes des audits est également constatée.
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L’année dernière, plusieurs revirements de jurisprudence ont été opérés en matière de congés payés. Les entreprises doivent les analyser pour la clôture des comptes 2023. Il en est ainsi du principe selon lequel les salariés doivent acquérir des congés payés lorsqu’ils sont en arrêt maladie. La Cour de cassation a jugé en septembre dernier (pourvoi n° 22-17.340) que cette exigence du droit de l’Union europénne s’applique quelle que soit l’origine de la maladie, professionnelle ou non. Et donc que le code du travail n’y est pas conforme. En effet, l’actuel article L 3141-5 limite, s’agissant de l’arrêt maladie, le droit à congés à la maladie professionnelle, cette dernière étant assimilée à une période de travail effectif — l’accident de travail ouvre aussi droit à congés payés dans les mêmes conditions. Ce qui revient à dire que cet article exclut l’arrêt pour cause de maladie non professionnelle du droit à congés payés.

Autre sujet abordé par la plus haute juridiction judiciaire en septembre 2023, celui de la durée maximum pendant laquelle le salarié acquiert des congés payés lorsqu’il est en arrêt pour maladie professionnelle ou pour accident de travail. Ce même article L 3141-5 limite la période de calcul des congés payés à un an (ininterrompu) de suspension du contrat de travail. La Cour de cassation a pointé là aussi le fait que le code du travail n’est pas conforme au droit de l’Union européenne (pourvoi n° 22-17.638).

Enfin, la Cour de cassation a précisé que le délai de prescription de l’indemnité de congé payé ne peut commencer à courir que si l’employeur a pris les mesures nécessaires pour permettre au salarié d’exercer effectivement son droit à congé payé (pourvoi n° 22-10.529). Auparavant, ce délai démarrait, dans tous les cas, lorsque la période de prise de congés payés s’achevait.

Modifications attendues

Les entreprises doivent donc analyser les conséquences comptables potentielles de ces positions jurisprudentielles. Le Conseil national de l’Ordre des experts-comptables (Cnoec) vient d’apporter un éclairage dans la perspective de la clotûre 2023 des comptes annuels. Tout en soulignant qu’il existe des incertitudes juridiques de taille notamment celle du délai de prescription des arrêts de travail à prendre en compte pour le calcul des congés payés. Soulignons aussi que, selon le Conseil d’Etat, le gouvernement souhaite apporter des modifications sur ce sujet dans le cadre d’un projet de loi actuellement débattu au Parlement, celui portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole.

Pour le Cnoec, chaque entité doit réaliser une analyse au cas par cas pour déterminer le traitement comptable des congés payés concernés par ces nouveautés jurisprudentielles. Pour lui, les situations comptables qui résultent des arrêts de travail sont les suivantes :

pour les salariés ayant quitté l’entreprise qui ont demandé une indemnité de congés payés : comptabilisation d’une dette en cas d’accord de l’entreprise avec le montant demandé étant précisé qu’un bulletin de paie est à établir ; si la demande est en cours d’instruction mais que l’entreprise n’a pas encore donné son accord, il faut enregistrer des charges à payer (comptes 428 et 438) ou une provision (compte 15) en fonction du degré d’incertitude ;

pour les salariés ayant quitté l’entreprise qui n’ont pas demandé d’indemnité de congés payés : comptabilisation d’une provision (compte 15) si l’entreprise estime qu’une sortie de ressources est probable ou certaine ou, dans le cas contraire, mention d’un passif éventuel dans l’annexe ;

pour les salariés présents dans l’entreprise pour lesquels la situation est régularisée sur le bulletin de paie : comptablisation de charges à payer (comptes 4282 et 4383) ;

pour les salariés présents dans l’entreprise pour lesquels la situation n’est pas régularisée sur le bulletin de paie : enregistrement d’une provision (compte 15) si l’entreprise estime probable ou certaine une sortie de ressources ou, dans le cas contraire, mention d’un passif passif éventuel dans l’annexe.

De plus, « les conséquences comptables induites par les décisions de la cour de cassation doivent être traitées comme des changements d’estimation conformément à l’article 122-5 du PCG, c’est à dire de manière prospective », avance le Cnoec. Il est donc probable que ce sujet impacte à la baisse les bénéfices nets comptables 2023 de certaines entreprises. Dans quelle mesure ?

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La Cour de cassation a pris en septembre 2023 de nouvelles positions concernant le droit à congés payés en cas d’arrêt maladie ou d’accident du travail. Dans une note, le Conseil national de l’Ordre des experts-comptables analyse les impacts potentiels pour la clôture des comptes 2023.
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Le crédit d’impôt issu de l’article 35 de la loi de finances pour 2024 bénéficie aux entreprises industrielles et commerciales qui réalisent des dépenses d’investissement dans les secteurs d’activité contribuant à la production de batteries, de panneaux solaires, d’éoliennes ou de pompes à chaleur (CGI art. 244 quater I). Il s’applique aux projets d’investissement dont la demande d’agrément est déposée depuis le 27-9-2023 et pour lesquels l’agrément est délivré au plus tard le 31-12-2025.

L’entrée en vigueur de ce crédit d’impôt devait être fixée par décret au plus tard 3 mois après la réception de la décision de la Commission européenne permettant de le considérer conforme au droit de l’Union européenne en matière d’aides d’État. Cette décision est intervenue le 8 janvier dernier et le décret n° 2024-212 du 11-3-2024 fixe cette entrée en vigueur à la date d’aujourd’hui. Par ailleurs, les équipements, composants essentiels ainsi que les matières premières utilisés dans le cadre des activités éligibles au crédit d’impôt viennent d’être détaillés (arrêté ECOE2335246A).

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Le Conseil d’État assouplit le strict formalisme exigé lors de l’option pour l’IS des sociétés de personnes. Il juge que cette option est régulièrement exercée par une société à responsabilité limitée (SARL) dont l’associé unique est une personne physique dès lors qu’elle a déclaré relever de cet impôt dans ses statuts dès sa création et a déposé ses déclarations de résultats sous ce régime.
Cette solution s’inscrit dans la ligne de la jurisprudence de la Haute Juridiction selon laquelle l’option pour l’IS, soumise en principe au respect d’un strict formalisme, est réputée exercée, dès lors que l’intention des auteurs de l’option est sans ambiguïté, alors même que toutes les formalités exigées n’ont pas été respectées.

L’option exige le respect d’un strict formalisme, parfois élargi

On sait que l’option pour l’IS d’une société de personnes est en principe soumise au strict formalisme prévu à l’article 239 du CGI et à l’article 350 F de l’annexe III au CGI. L’option doit ainsi être notifiée au service des impôts du lieu de son principal établissement avant la fin du troisième mois de l’exercice au titre duquel elle souhaite être soumise pour la première fois à l’IS. La jurisprudence admet également que cette option soit exercée en cochant la case prévue à cet effet sur le formulaire remis au centre de formalisme des entreprises (CFE) à l’occasion de la déclaration de création ou de modification de la société (Conseil d’Etat n° 342566).

A noter : Conformément aux dispositions de l’article 350 F de l’annexe III au CGI (figurant auparavant à l’article 22 de l’annexe IV au CGI), la notification doit être signée dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, par tous les associés, membres ou participants. La signature de la notification par l’ensemble des associés est prévue comme une exigence par défaut depuis 1993.

 

Les faits de l’espèce sont les suivants. Une SARL dont l’associé unique est une personne physique a, lors de sa création, mentionné dans les statuts son assujettissement à l’IS. Elle a ensuite déposé, spontanément et de manière constante, ses déclarations d’IS. À l’issue d’une vérification de comptabilité, l’administration a procédé à des rehaussements de bénéfices passibles de l’IS. Pour faire échec à ces derniers, la société a soutenu qu’elle n’avait pas opté pour son assujettissement à cet impôt dès lors qu’elle n’avait pas exercé régulièrement cette option selon le strict formalisme précédemment rappelé.
La cour administrative d’appel de Paris a donné tort à la société en jugeant que la mention dans ses statuts constitutifs de son assujettissement à l’IS et le dépôt constant des déclarations de résultats adéquates manifestaient sans ambiguïté sa volonté d’opter pour cet impôt et valaient souscription régulière de cette option (CAA Paris 9-11-2022 n° 21PA05958).

L’assouplissement du formalisme de l’option est étendu

Par la présente décision, le Conseil d’État confirme l’arrêt de la cour (Conseil d’Etat n° 470324). Il juge qu’une SARL dont l’associé unique est une personne physique qui déclare dans ses statuts constitutifs relever du régime de l’IS et qui, dès son premier exercice social, dépose ses déclarations de résultats sous le régime de cet impôt est réputée avoir régulièrement opté pour l’IS.
Le Conseil d’État étend en l’espèce l’exception au respect du strict formalisme imposé pour l’option à l’IS qu’il a déjà admise lorsque des éléments établissent qu’une SARL soumise à l’IS a manifesté, après la réunion de ses parts dans les mains d’un même associé personne physique, sa volonté de rester soumise à cet impôt. Cette exception est subordonnée au respect de deux conditions cumulatives : la société doit avoir opté dans ses statuts pour son assujettissement à l’IS, dans le délai prévu à l’article 239, I du CGI, et doit déclarer ses résultats, au titre du premier exercice clos après la réunion des parts dans une même main, sous le régime de l’IS (Conseil d’Etat n° 426850 et n° 426857). La Haute Juridiction fait ainsi application de cette solution au cas présent, c’est-à-dire dès la création d’une SARL dont l’associé unique est une personne physique.
Dans ses conclusions, la rapporteure publique, Émilie Bokdam-Tognetti, souligne que, si la rédaction de la décision du 20 mars 2020 précitée invite à distinguer l’option pour l’IS d’une EURL dès sa création et l’option pour l’IS d’une SARL devenue en cours d’existence une EURL par réunion de toutes ses parts en une seule main, il n’apparaît pas de motif juridique vraiment convaincant pour opérer une telle distinction. Elle ajoute que, si cette précédente solution est fondée sur l’analyse d’une moindre utilité du formalisme en l’absence de pluralité d’associés dont il conviendrait de recueillir l’accord, ce constat vaut tout autant pour les sociétés n’ayant eu, depuis leur création, qu’un unique associé. Elle n’identifie ainsi pas de raison de ne pas étendre l’assouplissement issu de ce précédent aux EURL qui, dès leur création, optent pour l’IS dans leurs statuts et qui déposent ensuite des déclarations à cet impôt.
Le Conseil d’État juge en outre que le seul fait pour la gérante qui, au demeurant, n’était pas l’associé unique d’avoir, dans le formulaire de création d’entreprise adressé au CFE, coché la case mentionnant l’assujettissement aux BIC n’est pas susceptible de remettre en cause l’option en faveur de l’assujettissement à l’IS. A noter que depuis le 1er janvier 2023, le guichet unique électronique des formalités d’entreprises (site formalites.entreprises.gouv.fr) se substitue aux CFE qui sont supprimés.

Faudra-t-il remettre en cause ce formalisme ?

Il est intéressant de relever que la rapporteure publique a indiqué dans ses conclusions que les modifications apportées aux conditions de signature de l’option, prévues à l’article 22 de l’annexe IV au CGI (reprises désormais à l’article 350 F, I de l’annexe III à ce Code) combinées aux élargissements successifs de la jurisprudence, devront peut-être conduire le Conseil d’État à « se réinterroger plus largement sur la portée et l’objet du formalisme prévu par cet article. Qui ce formalisme protège-t-il encore ou qui doit-il protéger : la société contribuable, les associés, l’administration fiscale, voire tous ces acteurs réunis ? ».
Mais, comme le souligne Émilie Bokdam-Tognetti, le cas de la présente affaire ne permettait pas de se livrer à cette réflexion d’ensemble, dès lors que la solution était déjà engagée par les évolutions récentes de la jurisprudence du Conseil d’État.

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L’option à l’IS des sociétés de personnes est, selon le Conseil d’État, régulièrement exercée dans le cas d’une SARL, dont l’associé unique est une personne physique, qui indique dans ses statuts constitutifs opter pour cet impôt et dépose ses déclarations sous ce régime.
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