[Loi de finances 2024] Pilier 2 : transposition de la directive relative à l’imposition minimale des groupes multinationaux

[Loi de finances 2024] Pilier 2 : transposition de la directive relative à l’imposition minimale des groupes multinationaux

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La directive (UE) 2022/2523 du 15 décembre 2022 visant à assurer un niveau minimum d’imposition mondial de 15 % pour les groupes d’entreprises multinationales et les groupes nationaux de grande envergure, dite « Pilier 2 », est transposée en droit interne. Un impôt national complémentaire, distinct de l’impôt sur les sociétés et non déductible de ce dernier, est instauré pour les groupes réalisant un chiffre d’affaires annuel consolidé supérieur ou égal à 750 M€ au cours d’au moins deux des quatre exercices précédents. Ces règles s’appliquent aux exercices ouverts à compter du 31 décembre 2023 et, pour la règle sur les bénéfices insuffisamment imposés, aux exercices ouverts à compter du 31 décembre 2024. 

On rappelle que, conformément au modèle de règles GloBE (« Global Anti-Base Erosion ») du Cadre inclusif OCDE/G20, la directive prévoit une règle d’inclusion du revenu (RIR), en vertu de laquelle un impôt complémentaire est dû par une « entité mère ultime » au titre des entités constitutives sous-imposées. La sous-imposition s’apprécie, non pas entité par entité, mais au niveau d’un État ou territoire. Elle est caractérisée lorsque le taux effectif d’imposition est inférieur à 15 %. 

Lorsque la RIR ne s’applique pas, une règle sur les bénéfices insuffisamment imposés (RBII) prévoit que l’impôt complémentaire est acquitté par toutes les entités constitutives du groupe qui se partagent cet impôt sur la base d’une clé de répartition définie par le texte. 

En outre, les États membres de l’Union européenne ont la faculté d’instituer un impôt complémentaire national afin qu’ils puissent bénéficier des recettes supplémentaires provenant de l’impôt complémentaire prélevé auprès des entités faiblement imposées situées sur leur territoire. 

Imposition minimale de 15 % 

Un impôt complémentaire est mis à la charge de l’entité mère du groupe lorsque le taux effectif d’imposition des entités constitutives du groupe localisées dans un même État ou territoire, prises ensemble, est inférieur au taux d’imposition minimum de 15 % (CGI art. 223 VJ nouveau).  

L’impôt complémentaire s’applique aux entreprises situées en France qui sont membres d’un groupe d’entreprises multinationales réalisant un chiffre d’affaires consolidé égal ou supérieur à 750 M€ au cours d’au moins deux des quatre exercices précédant l’exercice considéré, ainsi qu’aux entreprises situées en France qui sont membres d’un groupe national dont l’activité est développée sur le seul territoire français et respectant le même seuil de chiffre d’affaires (CGI art. 223 VL nouveau).  

Le taux effectif d’imposition est déterminé, pour chaque État ou territoire dans lequel le groupe est implanté et pour un exercice donné, par le rapport entre le montant des impôts sur les bénéfices et impôts équivalents supportés par les entités constitutives (entreprises, établissements stables, etc.) établies dans cet État ou territoire et le résultat réalisé par ces mêmes entités (CGI art. 223 VY nouveau). Afin d’éviter les distorsions entre les États et de neutraliser les différences de législation, le résultat des entités constitutives pris en compte pour les besoins de ce calcul est issu des états financiers établis aux fins de consolidation des comptes du groupe et fait l’objet de retraitements spécifiques et harmonisés afin de déterminer un « résultat qualifié » pour chacune de ces entités constitutives. Le montant des impôts pris en compte fait également l’objet de différents retraitements spécifiques et harmonisés. 

Sur la base de l’accord OCDE, l’impôt complémentaire est ainsi déterminé en application de deux règles distinctes :  

– la règle d’inclusion du revenu (RIR) qui s’applique à titre principal (CGI art. 223 WG à 223 WI nouveau). La RIR consiste à mettre à la charge de l’entité mère d’un groupe l’impôt complémentaire lorsque ses entités constitutives, prises ensemble, situées dans un même État ou territoire (France ou autre État membre), sont sous-imposées ; 

– la règle des bénéfices insuffisamment imposés (RBII) qui s’applique à titre subsidiaire (CGI art. 223 WJ à 223 WK quater nouveau). La RBII consiste à attribuer à un État ou territoire dans lequel est située une entité constitutive d’un groupe d’entreprises multinationales un montant résiduel d’impôt complémentaire dans l’hypothèse où le montant total de cet impôt n’a pas pu être perçu en application de la RIR. Il s’agit notamment du cas dans lequel la législation de l’État ou territoire de résidence de l’entité mère ultime du groupe ne prévoit pas l’application des règles du « Pilier 2 », en particulier la RIR. 

À noter : L’impôt complémentaire n’est pas déductible de l’assiette de l’impôt sur les sociétés ou de l’impôt sur le revenu.  

Option pour un impôt national complémentaire 

En cas de sous-imposition des entités établies dans un État ou territoire donné, les États ou territoires peuvent décider, sur option, d’instaurer un impôt national complémentaire (CGI art. 223 WF nouveau). Il s’applique aux filiales d’un groupe sous-imposé dans un État ou territoire donné et est perçu par ce même État ou territoire.  

Cet impôt national complémentaire est institué en France sur une assiette identique à celle prévue pour l’impôt complémentaire établi selon la RIR. Son montant correspond au supplément d’impôt résultant de la différence entre le taux minimum de 15 % et le taux effectif d’imposition applicable aux entités constitutives situées en France. Afin d’éviter toute double imposition, l’impôt national complémentaire est imputable sur l’impôt complémentaire calculé en application de la RIR ou de la RBII.  

Modalités déclaratives 

L’article 33 de la loi prévoit les obligations déclaratives et de paiement des entités membres d’un groupe soumis à ces règles, ainsi que les sanctions applicables en cas de manquement à ces obligations. Toutefois, les travaux étant toujours en cours à l’OCDE, il est également prévu d’habiliter le gouvernement à prendre par voie d’ordonnance toute mesure ultérieure du niveau de la loi relative à la déclaration, au recouvrement, au contrôle et aux sanctions des impôts complémentaires dus en vertu de ces nouvelles règles.  

L’article 223 WW du CGI désigne l’entité constitutive d’un groupe à qui incombe le dépôt d’une déclaration d’information au titre de l’impôt complémentaire, ainsi que le dépôt d’un relevé de liquidation de l’impôt complémentaire dû. Les modalités de règlement sont prévues au nouvel article 1679 decies du CGI. 

Par ailleurs, le nouvel article 1729 F bis fixe à 100 000 € le montant de l’amende qui sera due pour défaut de souscription ou pour retard dans le dépôt de la déclaration d’information ou du relevé de liquidation. Pour les autres manquements, le montant total des amendes ne peut excéder 50 000 € par déclaration. Enfin, le montant des amendes forfaitaires pour un même groupe ne peut dépasser un total d’un million d’euros. 

Le nouvel article L 172 I du LPF prévoit un nouveau délai de reprise de l’administration : celui-ci s’exerce jusqu’à la fin de la cinquième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due. 

Entrée en vigueur 

Les règles d’imposition minimale s’appliquent aux exercices ouverts à compter du 31 décembre 2023, à l’exception de la règle sur les bénéfices insuffisamment imposés, qui joue un rôle de « filet de sécurité » et qui s’applique en principe aux exercices ouverts à compter du 31 décembre 2024. 

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Suite de notre série consacrée à la loi de finances pour 2024. L’article 33 transpose en droit interne la directive (UE) 2022/2523 du 14 décembre 2022, dite « directive Pilier 2 », relative à l’imposition minimale de 15 % des groupes multinationaux.
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