Prêt intragroupe : des nouveautés sur la preuve du taux du marché

Prêt intragroupe : des nouveautés sur la preuve du taux du marché

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En l’espèce, une société holding avait acquis un immeuble financé en partie par un apport en compte courant que lui avait consenti sa société mère à un taux de 5,08 %.

À la suite d’une vérification de comptabilité de la société holding, l’administration a remis en cause la déductibilité des intérêts versés, considérant que le taux retenu (5,08 %) excédait celui fixé par l’article 39, 1-3° du CGI (soit 2,79 % pour la période considérée).

Pour justifier que le taux pratiqué au titre de cette avance en compte courant correspondait au taux du marché, la société emprunteuse a produit :

– un premier rapport identifiant, d’une part, la note de risque qui aurait pu lui être attribuée à partir de l’outil RiskCalc développé par l’agence Moody’s (soit Baa1) et, d’autre part, un intervalle de taux établi par référence à ceux obtenus par quinze sociétés non financières appartenant à des secteurs d’activité hétérogènes notées A3 à Baa3 ;

– et une seconde évaluation fondée, s’agissant de l’appréciation de la notation financière qui aurait pu lui être attribuée, sur le calcul de deux ratios financiers dont l’un rapporte le niveau d’endettement à la valeur des actifs immobiliers de la société (ratio « loan to value » ou LTV) et, s’agissant de l’appréciation du taux de pleine concurrence, sur les données relatives au marché obligataire issues de la base de données financières Standard & Poor’s Capital IQ.

Le tribunal administratif et la cour administrative d’appel de Paris ont rejeté les éléments produits par la société emprunteuse (TA Paris 13-4-2021 n° 1905733 ; CAA Paris 7-12-2022 n° 21PA03245).

Dans une décision du 5 avril 2024, le Conseil d’Etat relève tout d’abord que la note de risque attribuée à la société requérante avait été obtenue sans renseigner son secteur d’activité dans l’outil RisckCalc. Il écarte alors la méthode, considérée comme non probante, dès lors qu’il n’a ainsi pas été tenu compte de sa situation économique particulière.

Le Conseil d’Etat considère en revanche que la cour commet une erreur de droit en écartant la seconde évaluation au motif que le ratio LTV avait été calculé en tenant compte d’une dette financière correspondant exclusivement à l’emprunt.

De plus, pour écarter le taux, la cour considère que la société requérante, en comparant sa situation à celle de sociétés immobilières plus importantes qu’elle et déjà présentes sur le marché obligataire, ne justifiait pas qu’un emprunt obligataire aurait constitué une alternative réaliste à un prêt intragroupe. Le Conseil d’Etat censure cette analyse et juge que la taille d’une société n’est pas à elle seule de nature à faire obstacle à l’accès à ce marché et que le caractère réaliste, pour une société ayant recours à un prêt intragroupe, de l’hypothèse alternative d’un emprunt obligataire ne s’apprécie qu’au regard des caractéristiques propres de cette société et de l’opération. Les taux constatés sur ce marché devant le cas échéant être ajustés pour tenir compte des spécificités de la société en cause.

Enfin, le Conseil d’Etat relève que le taux de pleine concurrence avancé par la société emprunteuse repose sur la base de données financières Standard & Poor’s Capital IQ et que la fiabilité du recensement des transactions figurant dans cette base n’est pas remise en cause.

Notons que deux points de cette décision font l’objet d’une mention dans les tables du recueil Lebon :

  • l’utilisation de comparables sur le marché obligataire,
  • la possibilité de recourir à une base de données publique sans isoler un comparable.

L’affaire est renvoyée devant la cour administrative d’appel de Paris qui devra d’analyser, compte tenu de ces nouvelles précisions, les études produites par la société emprunteuse et d’apprécier la nécessité de procéder, le cas échéant, à certains ajustements de comparabilité.

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Complétant la jurisprudence relative à la déductibilité des intérêts intragroupe, le Conseil d’Etat apporte de nouvelles précisions sur les éléments permettant de justifier de la conformité au taux du marché du taux d’intérêt pratiqué au titre d’un prêt intragroupe.
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